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Dehors, les jeteurs de mauvais sorts, oiseaux de mauvais augure et autres fées carabosse !

Aux sommets de l’Etat, dans les chaires professorales et médiatiques d’éminents penseurs, dans certains organes d’information, un augure triste circule et résonne. Les printemps égyptien et tunisien ne seraient pas l’aube d’un été indien, mais un bref intermède avant un hivers aux mortelles rigueurs.

On ne sort pas indemne de décennies d’asphyxie sous la botte des tyrans, et les maux des individus et des familles se mêlent là-bas aux plaies de la société, justifiant que l’on s’y accorde le temps de vaquer aux soins réparateurs en même temps qu’à la construction de l’Etat de droit.

Nous, dont l’Etat fut si défaillant à l’heure de soutenir ceux qui souhaitaient devenir nos frères en démocratie, pourrions estimer qu’il s’agit là d’une tâche à laquelle nous serions honorés de concourir, loin des politiques d’abandon pratiquées jusqu’à présent.

Ne pas le faire serait mal, et nous en paierions de toutes manières le prix. Car si ces révolutions courageuses et inespérées nous passent du baume au coeur et donnent enfin le courage à nos journalistes de qualifier la Russie, la Chine, l’Algérie et le Maroc de tyrannies – ce qui est un progrès pour notre démocratie malade ! -, les laisser périr nous fera à nous aussi du mal.

Nous avons bien sûr ici en tête les précédents des révolutions « orange » en Ukraine, et « des roses » en Géorgie. Loin de les soutenir, nous les avons laissées seules face à l’Etat russe, vorace et antidémocratique – notre ennemi stratégique et idéologique. En Ukraine, un pro-Poutine s’est installé au pouvoir; et la petite Géorgie est amputée d’une partie de son territoire et vit sous la menace d’avancées supplémentaires de l’armée occupante.

Ces deux pays ont été laissés seuls, et c’est un sort semblable que les tristes pronostiqueurs cités plus haut annonce aux peuples de Tunisie et d’Egypte. Plus exactement, ils le préparent. Ils commencent à mettre en place les conditions d’un abandon au nom de la sécurité et de l’intérêt supérieur des démocraties occidentales à s’assurer un environnement stratégique sûr.

Apparemment cohérents, leurs arguments sont en fait fallacieux : préparant un refus d’assumer notre devoir de solidarité avec les peuples privés du respect de leurs droits fondamentaux, ils sont également destinés à couvrir les abandons précédents, ces errements anciens de notre politique internationale.

On ne devrait pas les laisser camoufler ce qui fut et demeure des fautes commises en notre nom en Tunisie, en Egypte, mais également au Maroc, en Chine, en Russie, au Togo, au Gabon, au Centrafrique… On ne devrait pas les laisser abandonner ces populations en notre nom.